QUI ETAIT AMBROISE CROIZAT ?

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ambroise_Croizat

Texte de Alain MARTIN

Quand Ambroise Croizat est nommé au Ministère du Travail, (Ministre ds travailleurs et non Ministre du Travail) le 21 novembre 1945, 138 caisses de Sécurité sociale sont édifiées en six mois sous sa maîtrise d’œuvre et gérées par un peuple anonyme après le travail ou sur le temps des congés, « pour en terminer, selon les mots du ministre, avec l’indignité des vies et les souffrances de l’enfance ».

Quatre grands principes, fondements même de l’identité sociale française, feront la charpente de l’institution.

– L’Unicité : tous « les risques sociaux » (maladie, maternité, vieillesse, accidents du travail…) sont regroupés dans une seule caisse.

– La solidarité : un système de répartition entre actifs et non actifs, financé par les richesses créées dans l’entreprise, est la pierre angulaire de l’édifice.

– L’Universalité, sous tendue par l’idée de soigner toute la population et de suivre « dans sa santé, l’individu de sa naissance à son décès ».

– La Démocratie, c’est-à-dire la volonté de confier la gestion de l’institution aux bénéficiaires eux-mêmes.

Mais là ne s’arrête pas l’héritage de celui que l’on appelle déjà le « Ministre des travailleurs ». Il laisse à l’agenda du siècle ses plus belles conquêtes : la généralisation des retraites, un système de prestations familiales unique au monde, les comités d’entreprise, la formation professionnelle, la médecine du travail, le statut des mineurs, des électriciens et gaziers, la prévention dans l’entreprise et la reconnaissance des maladies professionnelles, de multiples ajouts de dignité au Code du Travail, la caisse d’intempérie du bâtiment, la loi sur les heures supplémentaires …etc.

Comme nous prévenait Croizat quand il nous avertissait qu’il ne fallait jamais parler « d’acquis sociaux mais de conquis sociaux car disait-il rien n’est jamais « acquis », on a l’habitude depuis 60 ans de crier à la destruction de la Sécurité sociale : ordonnances Jeanneney, plans Barre, Juppé, contribution sociale généralisée de Rocard, lois Fillon, Douste-Blazy, Touraine, autant de coups de boutoir contre cette formidable institution révolutionnaire arrachée à la Libération dans une France ruinée par 6 années de guerre.

Mais force est de constater que malgré ces attaques répétées, de la Sécu, il en reste. Près de 500 milliards d’euros échappent encore chaque année à la gestion purement capitaliste. Un pactole. Comment ce bastion assiégé a-t-il résisté envers et contre tout ? Grâce à une invention modeste et parfaitement géniale : la cotisation, principe fondateur de la Sécu, « seule création de richesse sans capital. La seule qui ne va pas dans la poche des actionnaires mais est directement investie pour le bien-être des citoyens », disait Croizat. C’est bien grâce à ce mécanisme de cotisations dans des « caisses » abondées et gérées par les travailleurs – et sur lesquelles l’État n’a donc pas la main – que les plans successifs n’ont pas pu rogner la Sécu au-delà de ce qu’ils ont déjà fait.

C’est à cela que s’attaque Macron aujourd’hui en supprimant les cotisations salariales chômage et maladie, transférant le financement de la Sécu à l’impôt et aux patrons 

À leur bon vouloir, donc. Après l’avoir affaiblie pendant 50 ans, ils tentent aujourd’hui de tuer la Sécu en l’« étatisant ».

Et c’est bien pareil pour notre système de retraite par répartition qui souffre lui aussi des mêmes maux : manque de cotisations. 

Là où devraient donc être normalement constatés des excédents de l’ordre de 20 Md€ chaque année, le siphonage de la Sécu par l’Etat ne laissera donc subsister qu’un maigre excédent de 1 Md€. Cela passant pour l’essentiel, comme il était à prévoir, par le financement par la Sécu de la bascule du CICE : ce qui était jusqu’à présent crédit d’impôt, -pesant ainsi sur le déficit de l’Etat-, devient à partir de 2019 une réduction de cotisations sociales patronales, donc supportée par la Sécurité sociale sur ses ressources, une exonération qui ne sera pas compensée.

Il est temps de se relever, et de réclamer plutôt l’extension du principe simple de la cotisation à d’autres domaines pour « Mettre définitivement l’homme à l’abri du besoin, en finir avec la souffrance et les angoisses du lendemain ».  Et pour que « la retraite ne soit plus l’antichambre de la mort mais une nouvelle étape de la vie » comme le voulait Croizat.

(Ceci concerne le financement retraite – sécurité sociale. – chômage.). Explications.